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14 mars 2017

Matières relevant de la 3ème chambre

Domaine voirie - police - travail - étrangers

Domaine public – désaffectation d’un édifice cultuel – absence de déclassement – ensemble immobilier indissociable – Référé « mesures utiles »

Le juge des référés a été saisi, en vertu des dispositions de l’article L. 521-3 du code de justice administrative, par une commune lui demandant d’ordonner l’expulsion immédiate, au besoin avec le concours de la force publique, des occupants sans droit ni titre des locaux composant une église.

Il s’est prononcé sur sa propre compétence pour ce faire : les biens occupés (presbytère, jardin et église appartenant à la commune) pouvaient-ils être regardés comme non manifestement insusceptibles d’être qualifiés de dépendances du domaine public ?

L’édifice cultuel proprement dit n’avait pas, à la date de l’ordonnance, fait l’objet d’un déclassement intervenu en application des dispositions de l’article 13 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’Etat et du décret du 17 mars 1970 portant déconcentration en matière de désaffectation des édifices cultuels.

La circonstance que l’église ait effectivement cessé d’être affectée à l’exercice du culte n’a pas pour effet de lui retirer son caractère de bien appartenant au domaine public communal.

Les presbytère, jardin, sacristie et parvis attenants directement à l’église présentent pour celle-ci une utilité qui leur confère le caractère d’un ensemble immobilier indissociable.

Les lieux en cause, dans leur intégralité, ne sont pas manifestement insusceptibles d’être qualifiés de dépendances du domaine public dont le contentieux relève de la juridiction administrative.

TA Rouen, ordonnance du Président de la 3ème chambre, 13 mai 2016 n° 1601668.

Carte professionnelle permettant l’exercice de la profession d’agent de sécurité privée – Refus de renouvellement – Consultation du fichier TAJ (Traitement d’antécédents judiciaires) dans le cadre d’une enquête administrative

L’article 230-8 du code de procédure pénale prévoit que les décisions de non-lieu et, lorsqu’elles sont motivées par une insuffisance de charges, de classement sans suite font l’objet d’une mention, sauf si le procureur de la République ordonne l’effacement des données personnelles mais que, lorsqu’une décision fait l’objet d’une mention, les données relatives à la personne concernée ne peuvent faire l’objet d’une consultation dans le cadre des enquêtes administratives.

Un rappel à la loi pour divers délits, qui présente la nature d’une mesure alternative aux poursuites pénales, est suivi par une décision de classement sans suite prise par le procureur de la République.

Les faits en cause, bien que mentionnés dans le système TAJ (traitement d’antécédents judiciaires) ne pouvaient donner lieu à consultation dans le cadre d’une enquête administrative ni, a fortiori, fonder une décision de refus de renouvellement de carte professionnelle d’agent de sécurité privée.

TA Rouen , 3ème chambre 2016, n° 1404169, en C+

Procédure administrative contentieuse – Cristallisation du débat contentieux – Irrecevabilité des demandes nouvelles – Contentieux indemnitaire

Lorsque la réclamation préalable indemnitaire, implicitement rejetée, est fondée sur la faute ayant consisté en un défaut de surveillance des enfants par le personnel communal, la victime peut saisir la juridiction administrative sans délai en vertu des dispositions du 3° de l’article R. 421-3 du code de justice administrative*.

Toutefois, lorsque la requête dont elle saisit le tribunal n’est fondée que sur le défaut d’entretien normal de l’ouvrage public à l’origine du dommage, la victime ne dispose que d’un délai de deux mois à compter de son enregistrement pour invoquer un autre fondement de responsabilité.

Ainsi, les conclusions fondées sur un manquement du personnel communal chargé de la surveillance, formulées dans un mémoire présenté après l’expiration de ce délai, sont irrecevables en vertu de la jurisprudence « Intercopie » (CE, Section, 20 février 1953, Société Intercopie, p. 88 ; CE, 28 octobre 2009, Delanoue, n° 99252).

* Ce jugement a été rendu sous l’empire de la rédaction de l’article R. 421-3 du code de justice administrative antérieure à l’entrée en vigueur le 1er janvier 2017 du décret « JADE » qui a supprimé les dispositions du 3°.

TA Rouen, 3ème chambre, 7 juillet 2016, n° 1400074, en C+ 

Licenciement d’un salarié protégé – étendue du contrôle du ministre – condition tirée de ce que la demande de licenciement émane de l’employeur

S’agissant de l’appréciation de la condition tirée de ce que la demande de licenciement du salarié protégé émane de son employeur, il incombe seulement au ministre de s’assurer que la demande émane de façon suffisamment certaine de l’employeur

Il entache ainsi d’erreur de droit sa décision lorsqu’il estime que la cessation des fonctions de président de l’association et son remplacement par un nouveau président ont rendu caduque la délégation de pouvoirs consentie par l’ex-président au directeur général en application du règlement intérieur de l’association et que la subdélégation au DRH a été  implicitement abrogée.

TA Rouen, 3ème chambre, 25 août 2016, n° 1404429, en C+

Expulsion des demandeurs d’asile déboutés en période hivernale

La loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile, en ayant précisé les règles de gestion du dispositif national d’accueil, n’a pas entendu faire prévaloir à tout prix l’accès effectif des demandeurs d’asile à une structure appropriée sur les conditions de relogement des demandeurs d’asile déboutés en période hivernale.

L’instauration d’une procédure spécifique d’expulsion des demandeurs d’asile déboutés ne confère donc pas à cette procédure un caractère dérogatoire qui exclurait l’application du sursis aux expulsions prévu à l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution, généralement connu sous la dénomination de trêve hivernale.

L’invocation, par des familles de demandeurs d’asile déboutés se maintenant irrégulièrement dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile, du sursis à toute mesure d’expulsion du 1er novembre de chaque année jusqu’au 31 mars de l’année suivante présente le caractère d’une contestation sérieuse qui fait obstacle à ce que le juge des référés « mesures utiles » prononce l’expulsion demandée sur le fondement de l’article L. 744-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

(cf. TA Dijon, 9 mars 2016, 1600557 ; TA Nice, 14 mars 2016, 0600832 ; Em. Willem, Trêve hivernale au Palais-Royal, AJDA, 2016, p. 2081 s.)

TA Rouen, Président de la 3ème chambre, 3 novembre 2016, n° 1603368 et 1603362 en C

Procédure administrative contentieuse – Décision susceptible de recours - Police administrative des jeux

En vertu de l’article R. 421-1 du code de justice administrative et de la règle de la décision préalable, seuls sont susceptibles de recours devant le juge administratif les actes administratifs qui présentent un caractère décisoire et font grief.

Le tribunal administratif de Rouen a estimé que tel était bien le cas des lettres émanant du ministre adressées au directeur d’un casino*.

Par les deux lettres attaquées, le ministre s’est livré à une analyse des dispositions pertinentes du code de la santé publique et des dispositions réglementaires relatives à l’exploitation des casinos qui n’ajoute pas à ces textes.

Néanmoins, le ministre porte une appréciation motivée sur la situation de fait dont il a connaissance dès lors qu’il estime que l’installation de machines à sous dans l’espace fumeurs du casino est illégale en raison du caractère inconciliable des règles applicables.

De plus, en qualité d’autorité investie des pouvoirs de la police spéciale des jeux, le ministre rappelle au directeur responsable du casino que l’autorisation d’exploitation de l’établissement peut être suspendue, voire retirée, en cas de méconnaissance des dispositions de l’arrêté interministériel du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos.

Eu égard à la teneur des courriers et aux effets que l’administration a entendu leur conférer, ces correspondances présentent la nature de décisions faisant grief, susceptibles d’un recours pour excès de pouvoir.

(comp. TA Strasbourg, 11 mars 2015, 1400328 et 1400351 ; TA Montpellier, 23 février 2016, 1400432).

TA Rouen, 3ème chambre, 10 novembre 2016, n° 140238, en C+

* Ce jugement a été rendu avant l’adoption par le Conseil d’Etat de la décision « société Casino de Trouville et autres », censurant la solution d’irrecevabilité retenue.

Conseil d’Etat 7 février 2017 société Casino de Trouville et autres, n° 395588 :

«  2. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les courriers litigieux des 23 août et 25 novembre 2013 ont eu pour objet d’informer les sociétés requérantes que, contrairement à ce qu’elles avaient cru pouvoir déduire d’un courrier du 28 avril 2011 adressé au Syndicat des casinos de France par le secrétaire d’Etat chargé de la santé, les dispositions du code de la santé publique et de l’arrêté du 14 mai 2007 relatif à la réglementation sur les jeux dans les casinos interdisent d’installer des machines à sous dans des espaces fumeurs ; que ces courriers, par lesquels le ministre a fait connaître la portée qu’il fallait selon lui donner aux dispositions en cause et a invité les sociétés à se conformer à cette interprétation sous peine de sanctions prises au titre de ses pouvoirs de police spéciale des jeux, étaient, eu égard à leur caractère impératif, susceptibles de recours ; ».

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