Par une ordonnance du 28 juin 2024, le juge des référés suspend l’exécution de l’arrêté du 27 juin 2024 par lequel le maire de Rouen a interdit une soirée organisée par une association au slogan « Ausländer Raus » (« étrangers dehors ») le 28 juin au soir. Le juge des référés considère que l’interdiction posée par le maire porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale d’association et de réunion.
Le juge des référés rappelle tout d’abord que la liberté d’expression et de communication, qui s’exerce notamment par la liberté de manifester ou de se réunir, est une liberté fondamentale qui doit être conciliée avec les exigences qui s’attachent à l’objectif à valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public.
La seule circonstance qu’un évènement annoncé soit susceptible de provoquer des troubles à l’ordre public n’est donc pas de nature à justifier en toute circonstance une interdiction de réunion dès lors que l’autorité administrative dispose des moyens humains, matériels et juridiques de prévenir autrement les troubles en cause que par une interdiction.
Après avoir estimé, en l’état de l’instruction, que la diffusion du slogan polémique ne constituait pas une atteinte au principe de la dignité de la personne humaine et en l’absence de risque avéré de désordres matériels, le juge considère que l’utilisation de ce slogan pour une soirée dont la jauge ne peut excéder, en pratique, une trentaine de personnes, ne crée pas de troubles suffisamment graves à l’ordre public dès lors que le lieu de la soirée se trouve au sein d’un périmètre d’interdiction de manifester pris par le préfet de la Seine-Maritime le 27 juin 2024.
Le tribunal considère par conséquent que, quelle que soit la qualification juridique que peut recevoir le slogan utilisé par l’association organisatrice de la soirée et son caractère délibérément polémique, une mesure d’interdiction pure et simple présente un caractère disproportionné au regard des risques de troubles à l’ordre public que cette réunion privée est susceptible de produire. L’appréciation portée par le tribunal administratif n’exclut toutefois pas d’éventuelles poursuites pénales contre les auteurs d’agissements ou de propos racistes ou xénophobes.